Azay-le-Rideau

Le village d'Azay-le-Rideau s'appelait jusqu'au XVIIIe siècle 'Azay-le-Brûlé', en référence à Charles VII qui, en 1418, brûla la forteresse qui avait été édifiée vers 1119 par Ridel d'Azay (chevalier de Philippe Auguste), suite à une insulte d'une garnison bourguignonne qui occupait le domaine.

Le maître de la Chambre aux Deniers des rois Charles VII et Louis XII, Martin Berthelot, acheta la seigneurie puis la céda à sa mort à son fils Gilles Berthelot devenu trésorier du roi François 1er et maire de Tours. Le roi l'autorisa à 'rétablir les fortifications d'Azay'. Aidé par son cousin Jacques de Beaune, baron de Semblançay, (surintendant des finances de François 1er) et surtout par sa femme Philippa Lesbahy, Gilles y fit bâtir l'actuel château, entre 1518 et 1523. Au lieu d'une forteresse aux épais remparts, il s'agissait d'une somptueuse demeure aux signes extérieurs de puissance, reprenant certaines caractéristiques féodales. Toute cette richesse affichée de manière ostentatoire par un bourgeois parvenu ne fut pas du goût de François 1er qui, suivant les accusations de la reine mère Louise de Savoie, trouva en lui et son cousin des coupables tout désignés pour justifier sa banqueroute permanente : Jacques de Beaune fut pendu en 1527, et Gilles ayant pris peur, dut quitter le domaine.

Tombé en disgrâce - comme Fouquet le siècle suivant -, Gilles se vit ainsi confisquer ce château inachevé par François 1er qui l'offrit à Antoine Raffin, l'un de ses compagnons d'armes ; et Azay-le-Rideau conservera définitivement sa forme en 'L' plutôt qu'en quadrilatère comme initialement prévu.

L'ancienne dame d'honneur de Marguerite de Valois, Antoinette Raffin, la petite-fille d'Antoine, actualisa la décoration de l'édifice et lui redonna tout son éclat ; puis ce fut au tour de la gouvernante du futur Louis XIV, Françoise de Souvré, mariée au fils d'Antoinette (Arthus) d'habiter dans ce château qui reçut la visite de Louis XIII, puis de Louis XIV. En 1751, les alliés des Raffin : les Vassé, devinrent propriétaires du château.

Mais c'est un château laissé à l'abandon qui fut vendu près de 40 ans plus tard au marquis Charles de Biencourt, maréchal des camps et armées royales. Il y apporta de profonds changements pour lui donner son aspect actuel (en aménageant la bibliothèque, en constituant une collection de portraits historiques réalisés par les plus grands maîtres, etc.) et entretint le château avec le plus grand soin. Son fils Armand-François-Marie fit entreprendre une grande restauration du château (en remplaçant le vieux donjon par 2 tours style Renaissance aux angles des façades sur cour, en rétablissant les voûtes et les lucarnes, en aménageant des miroirs d'eau au sud et à l'ouest, en dessinant un grand parc paysagé etc.). Le château abritait à cette époque (vers 1862) l'un des plus beaux musées de France, ouvert au public.

Mais son fils Charles-Marie-Christian, ruiné, fut contraint en 1898 de vendre le domaine à l'homme d'affaires Achille Arteau qui, pour maximiser son profit, vendit séparément mobilier et œuvres d'art. En 1905, l'Etat racheta le château, vidé de son mobilier et le classa rapidement Monument historique. Commencèrent alors de profonds travaux de restauration.

Le château, bâti sur pilotis entre 2 bras de l'Indre, est structuré en forme de 'L' avec un corps principal et une aile en équerre.

Il incarne la transition entre la forteresse médiévale et le palais d'agrément : le château conserve des références féodales (douves, tours d'angle, mâchicoulis, créneaux, chemins de ronde sur les toits ...) mais perd son rôle militaire : l'architecture est bien de style Renaissance italienne avec la symétrie des ouvertures, l'harmonie et la richesse des décorations qui la caractérisent.

La cour intérieure mène à l'escalier d'honneur monumental à quatre niveaux de baies jumelées (marquant les demi-étages), au centre de la façade, qui contraste avec la régularité de la disposition des fenêtres. Cet élément de prestige est surmonté d'un fronton richement décoré par de fins ornements délicatement sculptés d'inspiration italienne (coquilles, médaillons, pilastres ...). La porte d'entrée est ornée des initiales de Gilles Berthelot et de sa femme. La salamandre (François 1er) et l'hermine (Claude de France) décorent la partie inférieure des baies. Il s'agit de l'un des premiers exemples d'escalier à rampe droite en France qui soit intégré au centre du logis principal et non plus dans une tour accolée (comme c'était le cas à l'époque médiévale). Ses rampes sont en pierre de part et d'autre de l'escalier et le plafond est à caissons décorés de médaillons à portrait.

Admirons aussi l'immense toiture d'ardoises, les chiens-assis ouvragés, les fenêtres à meneau, la beauté des poivrières aux faîtages effilés, ces tourelles d'angle surplombant la rivière et l'ordonnance des façades de pierre ciselée se reflétant dans l'eau, le cours de la rivière ayant été ralenti pour créer le meilleur effet de miroir possible.

(salon Biencourt)
L'intérieur du château est majoritairement de style renaissance italienne, avec de nombreuses tapisseries du XVIe et du XVIIe siècle, des meubles sculptés et des cheminées finement travaillées. Plusieurs salons ou appartements d'apparat ont été redécorés dans le style néo-renaissance au XIXe siècle. 

-C'est dans la grande salle située au 1er étage qu'étaient donnés les bals et les festins. Elle est décorée de tapisseries représentant des scènes de mythologie et comprend une cheminée monumentale peinte d'une salamandre et d'une frise de feuillage.

- Le salon Biencourt, avec sa magnifique cheminée ornée d'une salamandre, présente une collection de portraits dont François 1er, Henri III, Catherine de Médicis.

- La bibliothèque a été décorée par les Biencourt et comprend un mobilier Renaissance, dont un fauteuil tapissé de velours comprenant des inscriptions latines et une armoire de bois sculpté représentant les 4 saisons. Des documents illustrant les travaux de restauration engagés par les Biencourt y sont exposés.

- On remarquera dans la salle à manger son immense tableau 'Le festin de Balthazar', sa cheminée de marbre et sa vaisselle aux armes des Biencourt.

- Dans la salle de billard, les tapisseries flamandes retracent l'histoire de Babylone. La cheminée est monumentale.

-Dans l'appartement royal : l'antichambre est aménagée dans le style XVIIe, avec des tentures rouge et or, et les portraits de François 1er, Henri III et Louis XIII. Dans la chambre du roi -qu'occupa Louis XIII venu rendre visite à Françoise de Souvré-, on peut admirer un bureau en poirier noirci comportant des scènes de la guerre de 30 ans gravées sur de l'ivoire et un très beau lit à baldaquin suspendu.

- La chambre bleue, du nom de la couleur dominante de cette chambre, est décorée de tapisseries représentant des scènes de chasse et comprend un magnifique lit de satin brodé.

Le château est entouré par un parc à l'anglaise d'environ 8 hectares depuis 1825, date à laquelle le marquis de Biencourt a fait drainer les prairies. 

On trouve également dans le domaine :

- une chapelle du XVIIe siècle ajoutée à l'église paroissiale Saint-Symphorien

- 2 communs symétriques construits à la fin du XVIIe siècle à la place de bâtiments agricoles et d'une basse-cour