Émilie du Châtelet

Émilie du Châtelet a un parcours tout à fait remarquable pour une femme française du début du XVIII^e siècle. Certes, elle est aristocrate, ce qui facilite les choses. Elle est mathématicienne, physicienne, philosophe, écrivain (Discours sur le Bonheur) et traductrice des Principes mathématiques de la philosophie naturelle d'Isaac Newton rédigés en latin. Ceux-ci seront finalement publiés une première fois en 1756 et définitivement en 1759 par son ami Voltaire qu'elle avait initié à la physique.

Elle reçoit de son père, homme d'esprit, au service de Louis XIV, une éducation exceptionnelle. Il lui enseigne le latin et, auprès de ses précepteurs, elle apprendra aussi le grec ancien et l'allemand puis le clavecin, le chant et la danse. Jean-Jacques Rousseau et Fontenelle (écrivain et scientifique) et bien d'autres brillants esprits seront des familiers de la famille d'Émilie. Elle danse aussi, fait du théâtre, monte à cheval. Après son mariage, elle deviendra très coquette et aura de nombreux amants. Elle joue beaucoup d'importantes sommes d'argent. C'est une femme totalement libre.

Son nom est Gabrielle Emilie Le Tonnelier de Breteuil. Elle naît le 17 décembre 1706 à Paris et mourra en couches le 10 septembre 1749 à Lunéville en mettant au monde une petite fille qui ne vivra d'ailleurs que 20 mois. Elle est fille de Louis Nicolas Le Tonnelier, baron de Breteuil (oncle de François-Victor Le Tonnelier deux fois ministre de la Guerre de Louis XV, et de Gabrielle Anne de Froulay de Tessé. Son père l'introduit à la Cour du Régent en 1722. Trois ans plus tard, elle épousera le marquis Florent-Claude du Châtelet, gouverneur militaire de Semur-en-Auxois. Il est très occupé par sa carrière et ébloui, dit-on parfois, par les capacités intellectuelles de son épouse, à qui il accorde une très grande liberté, à condition que l'honneur soit sauf. Il a vingt ans de plus qu'elle. Ils vivront séparés à la demande d'Emilie.

Elle fréquente Bernoulli, Réaumur, Buffon, Léonard Euler et bien d'autres scientifiques ou intellectuels de son époque dont Maupertuis et Clairaut (de l'Académie des sciences) qui compléteront sa formation en physique et mathématiques. Elle apprendra vite et mettra un terme à sa vie mondaine. Elle rédige même un traité de physique que l'Académie des sciences publiera.

Voltaire et la marquise du Châtelet, deviendront amants en 1733 (ou 1734 selon les sources) et sont unis par une extraordinaire entente intellectuelle. Il vient de passer deux ans à Londres où il a eu l'occasion de comparer l'Angleterre et la France au grand désavantage de son pays. Après la publication clandestine (1734) des « Lettres philosophiques » (ou Lettres anglaises) une lettre de cachet sera lancée contre lui, pour embastillement. Émilie lui propose alors un asile au château de Cirey (Cirey-sur-Blaise, en Haute-Marne), propriété de son mari, où ils vivront la plupart du temps, jusqu'à la mort d'Émilie. Ce château se situe aux portes du duché de Lorraine, alors indépendant du roi Stanislas 1^er, ex-roi de Pologne et beau-père de Louis XV. Ce détail a son importance si Voltaire doit fuir la police du roi. Il fera restaurer le château à ses frais en faisant ajouter une aile. Il aime profondément cet endroit. Ils s'entoureront souvent de prestigieuses personnalités scientifiques. Elle sera sa muse, dit-on parfois, mais aussi sa confidente. Leur histoire d'amour durera cinq ans, puis 10 ans d'une amitié sans faille jusqu'à la mort d'Émilie. Il sera toujours admiratif de ses qualités et la poussera à approfondir encore plus ses connaissances scientifiques. Il sera à ses côtés jusqu'à la fin. Voltaire la surnommera tendrement Madame Pompon Newton.

Il existe de nombreuses biographies la concernant, des films, des pièces de théâtre, et même une bande dessinée. À titre personnel, j'aime beaucoup « Émilie, Émilie ou l'ambition féminine au XVIIIe siècle » (ouvrage réédité sous le titre "Mme du Châtelet, Mme d'Épinay ou l'ambition féminine au XVIIIe siècle") d'Élisabeth Badinter chez Flammarion qui traite en fait de l'histoire de deux femmes libres du XVIIIe siècle : Émilie du Châtelet et Louise d'Épinay pour « Les conversations d'Émilie » (Louise avait une petite fille nommée Émilie de Belsunce, qu'elle éleva comme sa fille)

A voir : https://www.chateaudecirey.com/

Avec un« Secret d'histoire » de 2019 (durée 1 h 49)

et le film « Divine Émilie » de 2007 (durée 1 h 39')

https://www.youtube.com/watch?v=iIE8J9ebVOE

Amusez-vous bien !